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HUARAZ

Ça y est, nous sommes arrivés à Huaraz après une nuit de plus dans le bus. Il est cinq heures du matin mais il fait déjà jour. Nous n’avons pas le temps de sortir récupérer nos sacs qu’un rabatteur nous saute dessus pour nous proposer un hébergement. Son prix est plutôt correct et sa voiture bien alléchante. Nous nous laissons conduire un peu à l’extérieur de la ville et finissons par accepter son offre pour cette première journée. Dans la majorité des auberges, si un client arrive tôt le matin et qu’il souhaite un lit pour finir sa nuit, il doit payer deux nuits : celle de la nuit passée et celle de la nuit à venir. La dame est sympa et nous laisse la chambre pour le prix d’une seule nuit. Nous n’allons pas nous en plaindre et nous profitons de ces bons lits pour compléter nos heures de sommeil.


Il est passé midi quand nous nous réveillons. Nous chaussons nos baskets, enfilons un pull et sortons explorer les rues de Huaraz. L’auberge se situe à quinze minutes à pied du centre, de quoi se dégourdir les pattes. Nous tombons sur un petit restaurant proposant des menus du jour à quatre et cinq soles (moins de 1.50CHF). Leur carte est variée et complète alors nous entrons nous installer à une table pour dîner. Le serveur nous apporte dans un premier temps une carafe de refresco del dia qui est inclue dans le prix et que l’on peut remplir à volonté. Ensuite arrive une soupe aux légumes et aux pâtes suivie de notre plat principal. Une fois le repas terminé, nous reprenons la route du centre-ville.



Nous nous rendons au point d’information de la ville pour obtenir une carte du coin et récupérer quelques bons plans. Visiblement, la dame n’est pas très coopérative et nous n’apprendrons rien de bien nouveau. Nous passons ensuite sur la place d’Armes, magnifique avec les montagnes qui la décorent au loin. Les Péruviens crient haut et fort que Huaraz est la Suisse Péruvienne à cause des sommets enneigés qui encerclent la ville et qui forment toute la cordillère blanche. Ils sont alors contents quand on leur dit que nous venons justement de là-bas. Nous savions que Huaraz était la capitale du trek au Pérou mais nous ne pensions pas être à ce point enchantés avant même d’avoir entamé une randonnée. Nous nous dirigeons dans les petites ruelles étroites du vieux centre et trouvons un tas d’agences de voyage. Nous allons poser quelques questions d’ordre logistique concernant le trek de Santa Cruz. C’est une marche de trois jours réputée pour être riche en paysages variés et magnifiques. Nous récoltons les informations dont nous avons besoin et continuons de flâner dans les rues de la vieille ville. Nous trouvons quelques magasins de trek et montagne qui font briller nos yeux. Puisque nous n'avons besoin de rien, nous repartons les mains vides en direction du supermarché afin de faire les provisions pour les jours à venir. Paquet de pâtes, sauce tomate, semoule, nouilles chinoises et divers snacks. Les emplettes faites, nous nous rendons ensuite au centre d'accueil des visiteurs de Huaraz où il nous faut nous acquitter du ticket d'entrée pour le parc national Huascaran. Chaque personne voulant entrer dans ce parc doit payer une taxe de soixante-cinq soles. Nous avions lu et entendu quelques récits racontant que parfois ce ticket d'entrée n'était pas vendu aux touristes voulant trekker seuls dans le parc, forçant de ce fait les gens à prendre un guide de montagne. Nous n'avons rien à perdre et tentons notre chance. La dame présente à l'office nous demande combien de temps nous pensons rester dans le parc et nous vend le billet tant convoité sans broncher.



Soulagés et tout sourire, nous retournons à notre auberge pour préparer nos sacs et répartir la nourriture. Nous profitons que la gérante soit là pour lui demander s'il est possible qu'elle garde toutes nos affaires le temps de notre absence. En lui assurant que nous reprendrons une nuit ici à notre retour, elle accepte. Elle nous propose même de nous commander un taxi demain matin. Il parait que les rues de ce côté de la ville ne sont pas très sûres tôt le matin. Le taxi nous conduira donc en quelques minutes jusqu'à l'arrêt de bus pour Yungay. Nous ne tardons pas à aller nous coucher afin d'être en forme demain matin.


Premier jour de trek :


Le réveil sonne tôt mais contrairement à d'autres fois, nous sommes frais et au taquet. On prend nos sacs, descendons le reste à la réception et attendons que le taxi arrive. Une fois arrivé, nous lançons nos sacs dans le coffre, montons à bord et à peine dix minutes plus tard nous voilà arrivés à l'arrêt de bus. Il faut bien se comprendre : nous sommes toujours au Pérou et le terme « arrêt de bus » ne signifie rien ici. Nous sommes juste à l'entrée d'un local où plusieurs mini-vans attendent que les gens embarquent. Rien n'indique nulle part que les départs pour Yungay se font ici, si ce n'est les feuilles indiquant une destination collées sur les parebrises. Nous sommes donc contents que le chauffeur nous y ait conduit. Nous n'avons pas le temps de descendre de la voiture que la fille chargée de rameuter les passagers prend déjà nos sacs pour les mettre à l'arrière du van. Nous payons le taxi en quatrième vitesse et nous voilà à bord du van qui démarre quelques secondes plus tard. Au Pérou, on a l'impression que tout se fait dans la précipitation, ne te laissant jamais le temps de réfléchir. C'est leur moyen de pression même si parfois ils sont vraiment pressés, comme ce matin. Nous roulerons pendant presque deux heures avant d'atteindre Yungay. Nous payons la course et nous frayons un chemin jusqu'à la sortie du van. Un type prend mon sac à la volée en me criant "Vaqueria" ? J'ai le temps de lui retourner un "Sì" avant qu'il ne mette mon sac dans le prochain van. Tout est si bien organisé, ils savent exactement pourquoi on est là et nous facilite grandement la vie. Cela dit, s'il est si pressé de prendre nos sacs, c'est uniquement pour qu'on n'aille pas voir un autre conducteur que lui. Tout est une question de business...! Xavier sympatise avec quelques Français à l'extérieur du véhicule pendant que moi je rencontre nos premiers Suisse-Romands du voyage à l'intérieur du van : Noélie et Adrien. Le feeling passe directement et nous regrettons de ne pas faire ce trek avec eux. Ils vont faire la marche jusqu'à la Laguna 69 aujourd'hui et feront le trek du Santa Cruz avec une agence le lendemain en deux jours.


La route jusqu'à Vaqueria, point de départ du trek, est sinueuse et parfois nous nous demandons si vraiment nous arriverons à destination sans égratignure. Xavier a un mal de ventre à n'en plus finir et moi la nausée me prend gentiment. Le paysage est absolument phénoménal entre pics montagneux enneigés, lagunes d'un bleu éclatant et le ciel totalement dégagé. Nous avons hâte d'arriver à destination et d'entamer ce trek. Quelques heures plus tard, nous voilà arrivés à Vaqueria, accueilli par un Péruvien vivant dans ce village. Il nous indique directement le coin des toilettes sans attendre que nous le demandions. En fait, ce n'est qu'un endroit derrière la petite maison, sans porte ni rideau et un simple trou allant directement dans la canalisation. C'est rudimentaire parfois, mais ça fonctionne. Nous échangeons ensuite quelques mots avec lui et apprenons qu'ils ne sont que treize à vivre dans ce village et qu'ils vivent principalement des touristes venus pour le trek. Les autres vans arrivent petit à petit et nous profitons qu'ils soient tous en train de déjeuner pour nous mettre en route et marcher seuls.



Pour la minute culturelle, le trek de Santa Cruz se situe dans le parc national Huascaran dans la Cordillère Blanche. La marche rallie Vaquéria, qui se situe à 3700 mètres d'altitude, à Cashapampa à 2900 mètres. Le point culminant du trek se trouve à 4750 mètres en passant le col de Punta Union. De là, on jouit d'une vue spectaculaire sur le massif Tawllirahu et la vallée descendant jusqu'à Cashapampa. Un peu plus loin, le sommet de l'Alpamayo se dévoile et trône fièrement.


Pour cette première journée, nous sommes bien loin de ces grandes et belles montagnes, il s’agit plutôt d’une marche d’approche. Nous commençons par un petit sentier fait de cailloux et de terre étroit et entouré par la végétation. Nous descendons jusqu'à un petit village reculé appelé Huaripampa. Nous croisons un muletier avec ses ânes sur le chemin. Il va certainement à la rencontre des groupes de marcheurs venus avec les agences. Nous n'aurons pas le loisir d'avoir des mules pour nous aider mais nous ne nous plaignons pas car notre sac est nettement moins lourd que lors du trek de l'Ausangate. Il fait une chaleur que nous n'attendions pas. Le soleil tape dur et nous enlevons presque toutes nos couches. Depuis Huaripampa, nous devons maintenant remonter de l'autre côté de la rivière. Le chemin n'est pas trop raide mais une montée reste une montée et par principe, c'est pénible. Nous trouvons sur le chemin un élevage de cochons d'inde. Nous demandons à la propriétaire si nous pouvons visiter, curieux. Elle accepte et nous invite chez elle pour voir tous ses clapiers. Ces petites bêtes vivent quelques mois et ensuite sont vendues aux marchés. Pour avoir testé (quelques jours plus tard !) dans nos assiettes, ça n'a pas vraiment de goût et ça ressemble à du poulet. Finalement, cette petite visite nous aura plutôt attristés. Ils sont si mignons et doux, ... dommage de les manger !



Nous continuons notre route et après avoir fait contrôlé notre billet d'entrée du parc au point de contrôle, nous traversons une grande prairie d'un vert éclatant décoré d'une rivière coulant tout tranquillement et de quelques lamas broutant sans se soucier des marcheurs qui les entourent. Nous nous trouvons encore dans la vallée et nous n'apercevons pas beaucoup de montagnes. Imaginez un peu notre déception après la montée en bus grandiose jusqu'à Vaqueria. Il faut savoir patienter et garder le meilleur pour plus tard, comme quand on mange un mille-feuille. Nous ne nous décourageons pas et faisons une petite pause, accoudés à une souche d'arbre pour dîner. Les moustiques nous tournent autour mais nous ne leur accordons que très peu de notre peau avant de renfiler les bas de pantalon et nos pulls. Le paysage est beau et reposant. Nous avons bien fait de partir avant tout le monde, cela nous permet de profiter de ce décor sans bruit. On aurait presque envie de faire une petite sieste s'il ne restait pas quelques bons kilomètres à parcourir. Nos gambettes nous rappellent l'heure qui tourne et nous voilà déjà repartis pour ce dernier tronçon. Une fois arrivés au point de campement Huaripampa, nous sommes un peu frustrés de voir autant de tentes installées pour les agences. Le muletier que nous abordons pour lui demander quelques informations nous assure que le prochain point de campement, Paria, se trouve à 45 minutes de là. Nous décidons alors d'y marcher. Nous ne savons pas si les muletiers n'ont pas le même ordre de grandeur que nous ou s'ils ne sentent tout simplement pas l'effort parcouru, mais nous décidons de nous arrêter une heure plus loin, à côté de la rivière, sans avoir atteint le point de campement.


Nous installons la tente, prenons de l'eau pour cuire le souper à la rivière d’à côté et profitons de ce temps magnifique pour nous reposer adossés aux gros cailloux nous entourant. Une vache se risque à brouter un peu trop près de nous et se retrouve surprise de nous voir sur son territoire. Elle nous observe puis retourne plus loin dans la forêt. La nuit arrive et nous rejoignons notre sac de couchage tant apprécié.



Deuxième jour de trek :


Nous nous réveillons avec le bruit des oiseaux à huit heures et sortons tranquillement préparer le petit-déjeuner. La vache curieuse de la veille broute autour de notre tente. Nous lui demandons gentiment d’aller un peu plus loin voir si l’herbe y est bonne. Etonnamment, elle s’exécute comme si elle comprenait le français ! A neuf heures, les premiers groupes de marcheurs en agence nous passent devant et nous incitent alors à nous mettre en route. Nous plions le campement et nous leur emboîtons le pas.


Nous reprenons alors le petit chemin escarpé entre buissons et cailloux que nous avions abandonné la veille. En une heure, il nous emmène sur le replat où nous aurions dû camper pour notre première nuit. Autant dire que les quarante-cinq minutes annoncées par le muletier n’étaient qu’un leurre. Là, nous profitons de la vue magnifique sur la montagne du Tauliraju qui culmine à 5830 mètres. Le ciel dégagé nous offre un spectacle grandiose. Nous ne sommes pas encore au col et on en prend déjà plein les yeux. Nous rencontrons deux Canadiens, André et Jordan, dont l’un est acteur et l’autre photographe. Nous discutons rapidement et remarquons déjà quelle paire formidablement drôle ils font.


Le chemin monte progressivement mais sûrement. Nous ne voyons encore rien de notre destination mais nous évoluons dans un décor magnifique, presque comme dans les Alpes. Un pas après l’autre, nous arrivons au niveau de plusieurs lagunes dont celle de Huiscash qui est moins jolie que ce à quoi nous nous attendions. Nous pouvons à présent deviner le passage du col plus en hauteur, au milieu de la roche. Du courage et de la motivation ne seront pas de trop. N’ayant aucun gros sac à porter, les groupes de marcheurs nous dépassent les uns après les autres. Nous suivons et sommes un peu découragés de les voir galoper ainsi. Nous essayons alors de faire abstraction de leur présence et d’avancer comme si nous étions seuls sur ce sentier, tout en profitant du paysage.



La pente devient plus raide et l’altitude rend cette partie un peu difficile. Nous réussissons pourtant à trouver la cadence qui nous fait avancer sans trop nous fatiguer. Nous gagnons de l’altitude progressivement, dépassons à notre tour quelques marcheurs, admirons le paysage et faisons une pause face à la lagune Morococha avant d’entamer la montée ultime. Je suis déjà épuisée rien qu’en regardant ce dernier passage : raide, étroit et rocailleux. Une petite voix me murmure à l’oreille que la vue en sera d’autant plus saisissante une fois au col. Sur ces belles paroles, nous nous relevons et partons attaquer cette dernière partie.



Nous arrivons au col Punta Union à 4750 mètres en sueur et avec le souffle court ; coupé à la fois par l’effort fourni pour arriver ici mais surtout par la vue absolument hallucinante qui nous est donnée d’admirer. La chaîne de montagnes formée des pics Pucahirca, Rinrihirca et Tauliraju s’étend à quelques mètres de nous. Le glacier Arhuay, plus impressionnant depuis l’autre côté de la chaîne montagneuse et que nous découvrirons seulement demain, s’étend jusqu’à la lagune Taulicocha, au creux de la montagne en contrebas. Le bleu si lumineux et à la fois opaque de l’eau contraste avec le gris de la roche. C’est tout simplement saisissant. Nous nous calons derrière quelques rochers pour pique-niquer, à l’abri du vent et du passage. Les deux Canadiens finissent eux aussi par arriver, épuisés mais fiers de ce qu’ils viennent d’accomplir. Non loin derrière arrive un guide et son client luttant avec le manque d’oxygène. Nous n’avions encore jamais vu les effets réels de l’altitude. Le pauvre gars n’avait vraiment pas l’air dans son assiette et sommes bien contents d’être acclimatés à ces hauteurs.



Ce n’est qu’une heure plus tard que nous décidons d’entamer la redescente jusqu’à l’aire de campement Taulilipampa. Si nos jambes nous le permettent, nous souhaitons pousser un peu plus loin et gagner du terrain pour le lendemain. Le vent se lève et ne nous fait pas de cadeau. Il souffle fort dans nos oreilles et il transperce nos vestes. Nous rejoignons finalement le plat de la vallée et trouvons un terrain différent. Nous laissons les cailloux et le paysage montagneux derrière pour maintenant découvrir un terrain verdoyant qui nous mènera directement au premier campement. Nous arrivons à Taulilipampa peu de temps après. Vu l’heure déjà avancée et le soleil qui décline, nous décidons de planter notre tente à l’écart de tous les autres marcheurs, surveillés par le regard bienveillant de Bobby-78. Nous essayons de monter la tente le plus vite possible avant que le vent n’emporte la toile. Nous préparons nos affaires et sortons le nécessaire de cuisine pour se faire un thé bien mérité. Une heure et demie plus tard nous rejoignent Elodie et Thomas un couple de Français faisant également ce trek en autonomie. Xavier les avait rencontrés au changement de mini-bus, le premier jour du trek. Ils se joignent à nous pour la soirée et plantent leur tente à côté de la nôtre. Nous passons une excellente soirée à discuter, rigoler et prévoir la journée du lendemain. Nous assistons à un magnifique coucher du soleil dont les couleurs d’un orange profond, puis d’un violet inattendu nous laisse sans voix. Mais voilà, au Pérou dès que le soleil n’est plus de la partie, le froid s’installe sans crier gare et vient refroidir tous nos membres. Nous décidons alors de faire la vaisselle et d’aller dormir sans plus attendre.



Troisième jour de trek :


Aujourd’hui, nous nous octroyons quelques heures de sommeil, puis nous mettons en route pour faire un détour par la lagune Arhuaycocha quelques 400 mètres plus haut. Nous prenons un raccourci broussailleux dont le chemin si étroit ne permet le passage que d’une personne à la fois. Nous nous mettons donc en file indienne et avançons ainsi pendant quelques dizaines de minutes tout en faisant attention à ne pas se crocher dans une ronce au passage. Une fois arrivés au mirador Alpamayo, nous décidons de cacher nos gros sacs dans les broussailles et de continuer légers. En effet, nous devrons repasser par ici pour rejoindre le prochain campement de toute façon alors autant s’économiser un peu de force. Une fois les sacs à l’abri, nous poursuivons le petit sentier pour arriver dans une grande prairie peuplée de quelques lamas en liberté, d’un ruisseau à multiples bras et d’un panorama sublime sur la montagne Alpamayo. Cette montagne est célèbre car elle n’est autre que l’emblème de la compagnie cinématographie Paramount. Xavier part devant avec Thomas tandis que moi je reste à l’arrière avec Elodie. Nous discutons de nos vies respectives, de nos projets, de nos voyages et de nos découvertes, de bons plans, de notre façon de voyager et de la vie de couple quand on est sur la route si longtemps. Le plat de la prairie nous permet de papoter longuement mais bientôt la dénivelée reprend de plus belle. Nous passons le camp de base de l’ascension de l’Alpamayo que nous visions la veille ; il est désert mais proche de la lagune. Nous marchons encore vingt minutes et nous voilà émerveillé par le spectacle. Le glacier Arhuay descend tout droit dans la lagune et on peut entendre ses craquements. L’étendu d’eau est entouré par trois montagnes faisant partie de la même chaîne. C’est difficile de mettre des mots sur la beauté de l’endroit et la tranquillité dont nous sommes témoins. Soudainement, les deux Canadiens arrivent et nous voilà à partager ce moment tous les six.



Le retour se fera avec admiration envers les montagnes qui nous encerclent. Nous discutons encore et encore presque sans reprendre notre respiration. Nous trouvons nos sacs là où nous les avions cachés et continuons notre chemin vers le prochain campement. Nous suivons un chemin étroit et très raide au milieu de la broussaille qui nous emmène tout droit dans la vallée. Nous décidons de dîner à l’ombre d’un arbre avant qu’il n’y en ait plus aucun. Après ce moment de partage et de rire, nous continuons notre périple dans la vallée où une chaleur inattendue vient nous envelopper. Le vent fort compense cette sensation et rend la marche presque agréable. Nous dépassons des carcasses de vaches, longeons une lagune et faisons un détour nécessaire par de gros rochers. Il reste encore quelques kilomètres de marche mais nous sommes fatigués par ce vent et nos pieds nous font tous souffrir. Les garçons trouvent un petit coin où planter la tente à côté d’une autre lagune. Ils n’ont même pas besoin d’énoncer leur idée que nous comprenons leurs intentions dès notre arrivée vers eux. Nous ne camperons pas au point officiel avec tous les autres marcheurs mais resterons ici, dans ce coin de paradis à deux kilomètres de là.



Les Canadiens nous rejoignent peu de temps après, décident de dîner là (bien qu’il soit déjà plus de 16 heures) et repartent pour gagner du terrain tant qu’il fait jour. Nous nous donnons rendez-vous à Huaraz pour un dernier repas tous ensemble au cas où nous ne nous reverrions pas durant le trek. Après leur départ, nous nous mettons nous aussi aux fourneaux. Nous passerons une soirée agréable avec un petit feu et en bonne compagnie, le tout devant un paysage magnifique.



Quatrième jour de trek :


Le froid est piquant ce matin. Nous enfilons un pull, la doudoune, un bonnet et nous allons relancer les braises du feu de la veille. Nous mangeons notre petit-déjeuner face à la lagune et au ciel bleu annonçant une belle journée. C’est au moment de plier la tente que nous apercevons Noélie et Adrien rencontrés dans le van il y a trois jours. Ils auront eu le temps de faire leur marche d’une journée puis de démarrer le trek de Santa Cruz avant que nous n’ayons eu le temps de le terminer. On échange quelques mots et on se donne rendez-vous également à Huaraz avant que chacun ne reparte de son côté. Il ne nous faut à présent plus trop de temps pour ranger nos dernières affaires et nous remettre en marche.


Quelques dizaines de minutes de marche nous permettent d’atteindre le campement officiel où tous les marcheurs ont dormi la veille. Nous sommes bien contents de ne pas avoir poussé jusqu’ici hier. Il nous reste encore treize kilomètres avant d’arriver à Cashapampa, le point final du trek. Sur la carte, on peut voir le chemin longer la rivière sans difficulté apparente. C’est donc confiant et de bonne humeur que l’on continue cette longue journée de marche. Si nous avons sous-estimé le terrain en lisant la carte, la montagne aura bien vite fait de nous rappeler que c’est elle qui mène la danse. Le chemin est rempli de pierres et de cailloux de toutes tailles, nos pieds sont couverts de cloques dans les moindres recoins et la pente descendante nous fait grimacer à chaque pied avancé.



Le paysage reste magnifique et la douleur ne nous empêche pas de nous émerveiller devant chaque cascade et devant la rivière dont la couleur est d’un bleu limpide. Cette nature est bien différente de celle rencontrée au col Punta Union. C’est bien plus verdoyant, plus vivant et chaleureux. La descente se poursuit ainsi pendant plus de quatre heures. On pique-niquera au bord de la rivière, à l’ombre de quelques arbres et on se redonnera mutuellement courage et motivation.


Sur le dernier tronçon, je rencontre la guide d’un groupe de plus de dix marcheurs. Elle me demande ce que nous prévoyons de faire une fois à Cashapampa et elle me propose de rentrer avec le véhicule prévu pour son groupe pour un peu moins cher que les transports publics. Je lance cette idée à mes trois acolytes et c’est sans hésitation que trois « oui » se font entendre. Nous terminons les trois derniers kilomètres sur les rotules mais avec joie. Nous retrouvons Noélie et Adrien attablés et buvant une bière en attendant leurs compagnons de route. Nous les rejoignons avec grand plaisir. Une fois tout le groupe réunit, nous embarquons dans le bus et nous laissons bercé jusqu’à Huaraz.


Quelques heures de route plus tard, nous débarquons sur le parking proche de la place principale, nous nous donnons tous rendez-vous un peu plus tard dans la soirée pour passer le repas ensemble. Nous avions rêvé d’une fondue pendant quatre jours mais le restaurant en question étant fermé, nous nous rabattons sur un bon burger et une grande pizza. Une soirée remplie de rire et de partage, comme on aime. Jordan et André nous rejoindront au cours du souper. L’équipe est au complet, c’est parfait.



Jour de repos et VTT :


Après ces quelques jours de trek, nous nous accordons une journée de pause bien méritée pour dormir et recharger nos batteries. On profite aussi de changer d’hébergement et de retrouver les deux Suisses dans leur auberge pour passer notre dernière nuit. On aura ainsi l’occasion de rencontrer d’autres voyageurs, de comparer nos récits et d’échanger quelques conseils. En attendant le retour de Noélie et Adrien, nous organisons la journée du lendemain. L’idée de visiter le haut de Huaraz en VTT nous tente bien. Ça tombe bien car l’auberge loue des vélos pour pas trop cher.


Quelques heures de repos plus tard, Noélie et Adrien arrivent et nous décidons de sortir faire les courses pour le souper. Adrien et Xavier partent boire des bières pendant que Noélie et moi allons au marché local faire quelques emplettes. On passera deux heures à faire les stands de fruits et légumes tout en nous racontant nos vies et quelques anecdotes. Nous retrouvons les gars à l’auberge bien confortablement installés dans un sofa, un verre de bière à la main. On s’occupera du souper tout en prenant l’apéro à la bonne franquette. Super soirée « comme à la maison » qui fait beaucoup de bien. La discussion et les rires vont bon train et nous finirons par aller nous coucher assez tard.


Le réveil sonne à 8 heures pétante pour le petit-déjeuner de folie organisé par les staffs de l’auberge. Ce matin, nous avons droit à des pancakes au dulce de leche. Ça faisait longtemps que cela ne nous était plus arrivé. La journée commence plutôt bien !

Nous retrouvons le gérant à 9 heures devant l’entrée avec deux VTT posés contre le mur. Il nous montre comment tout fonctionne et nous emmène (à vélo) jusqu’à l’arrêt de bus. Aidé par le conducteur du van, il fixe les vélos sur le toit et nous embarquons à l’avant. Le minibus se remplit de locaux qui retournent chez eux à l’écart de la ville. Une heure de route plus tard, nous descendons au milieu des champs et des arbres un peu plus loin du site archéologique Ichic-Willkawain. Nous montons sur nos vélos et roulons sur une route faite de terre et de cailloux. La météo joue en notre faveur et nous profitons d’une belle vue sur les montagnes qui nous entourent. Après une heure de vélo, nous rejoignons le Lazy Dog Inn, où il y a l’intersection pour redescendre sur Huaraz par des petits chemins perdus. Nous décidons de poursuivre notre balade un peu plus loin et poursuivons sur la même route que précédemment.


Nous croisons quelques locaux affairés dans leurs potagers et nous finissons par arriver à l’entrée du parc Huascaran. Nous nous installons près de la rivière faire quelques photos, prendre le temps d’admirer la beauté du coin et pique-niquer au calme. Nous voyons un type d’une quarantaine d’année venir guigner et nous dire bonjour. Il repart mais sa curiosité sera plus forte et il revient quelques minutes plus tard. Il s’approche et nous discutons avec lui. Il ne voit clairement pas souvent de touristes dans le coin. Il vit dans la cahute en terre et en paille juste à côté et travaille ici. Sa vie est des plus simple et rudimentaire. Nous lui proposons une banane et quelques barres de céréales au chocolat pour son plus grand plaisir. Nous avons rarement vu quelqu’un aussi heureux de recevoir une banane. Au fil de la conversation, il nous apprend qu’il s’appelle Javier, version espagnol de Xavier. Une photo s’impose !



Après une accolade amicale, nous reprenons nos vélos et redescendons par la même route jusqu’à la Lazy Dog Inn. Nous bifurquons à gauche et descendons sur des petits chemins raides encombrés de pierres. Nous passons par des petits villages reculés où l’espagnol ne se parle déjà plus. Du maïs sèche sur des bâches au milieu du terrain de foot du village, une dame toute voutée trie des grains de quinoa et un vieux monsieur nous demande de lui offrir un de nos vélos. Normal. On continue notre route où cette fois des chiens furieux nous prennent en chasse les crocs dehors. Ils manquent de nous croquer un mollet ; plus de peur que de mal. La descente se fait plus rapidement que la montée et nous voilà déjà sur les routes bondées de Huaraz. On ne comprend pas tout bien qui possède la priorité sur qui à certains endroits et je dois piler sur les freins plus d’une fois. Nous arriverons finalement à l’auberge en entier, contents de notre journée.



Nous retrouvons Noélie et Adrien déjà rentrés de leur promenade à cheval. Nous leur racontons nos aventures avant de prendre une bonne douche et de finir nos sacs. Nous les laissons se reposer pendant que nous allons nous aventurer dans le grand marché de Huaraz. Vivant, bruyant, bordélique… comme on les aime. On profite de flâner et de faire quelques photos de cette ambiance particulière. Le Pérou est aussi réputé pour pouvoir manger dans la rue toutes sortes de pâtisseries salées et sucrées. On se laisse tenter par un énorme « on ne sait même pas quoi » frit avec du caramel coulant dessus. Un délice. Xavier profite d’acheter de la bobine de fil pour recoudre ses innombrables vêtements troués par l’usure avant de remonter tranquillement le long de ces rues pleines à craquer.

Un peu plus tard, nous partons tous les quatre souper dans un petit restaurant bien local à côté du terminal. Xavier se décide enfin à gouter la dernière spécialité du Pérou qu’il n’avait pas encore testée : le Cuy. Pour ma part, je reste dans le classique et commande un poulet broaster avec du riz et une salade. Repas bien agréable et en bonne compagnie avant de prendre le bus de nuit pour Trujillo, sur la côte du pays.




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